Publié le 08 Décembre 2020
0/3 – Cet article est l’introduction à trois articles à venir qui reprendront et préciseront les thèmes abordés dans cette amorce.
« Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas d’art ? », se demandait Marcel Duchamp. En tant qu’architectes, nous nous demandons si nous faisons, ou aimerions faire des projets qui « ne soient pas d’architecture » ; des projets « urbains » ou « architecturaux », dans lesquels le contexte de conception du projet est tellement contraint qu’il nous pousse à une limite de notre exercice.
En 2018, nous répondions à un concours restreint en conception-réalisation pour 48 logements et 800m² de commerces à Garges-lès-Gonesses. La situation était la suivante : un quartier (la Dame Blanche), en pleine mutation urbaine NPNRU (Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain engagé depuis le début des années 2000 sur l’ensemble de la commune), une parcelle située à proximité du fort de Stains, un objectif budgétaire extrêmement contraint par le bailleur social et l’entreprise de notre tandem de conception-réalisation.
Dans ces conditions de travail devenues habituelles (dimension budgétaire), proposer un projet « qualitatif » (les critères du qualitatif étant toujours à définir), et ayant du sens (partie la plus ardue dans cette configuration de travail), relevait de la gageure.
Trois choses étaient certaines à ce stade, sans même que nous ayons encore esquissé le moindre croquis :
1. L’impossibilité de penser une architecture complexe et riche. Elle serait inévitablement compacte (vocable d’usage), unitaire et simple.
Alors comment tenter de trouver de la qualité spatiale et formelle dans ce cas de figure ?
- Par une présence de la masse et un aspect monolithique franc,
- Par une utilisation de la monochromie renforçant la présence et visant un mutisme puriste.
2. Pas de proposition autour d’usages spécifiques ; seulement des réponses à des problèmes génériques.
Alors comment dans ces conditions réussir à fabriquer d’autres formes d’usages ?
- En questionnant le mystère dans la ville contemporaine pour proposer un usage non défini,
- En introduisant du mythe dans le projet.
3. Une impossibilité de travailler l’architecture en tant que plein qualitatif.
Alors comment proposer de la qualité pour les futurs habitants ?
- Nous avions pour nous le site et une parcelle étirée, le long d’un axe urbain très emprunté. Il paraissait donc urgent de ménager un vide dans lequel pourrait prendre place ce mythe.
Dans les prochaines publications, nous décrirons précisément notre intérêt pour ces thèmes (architecture monolithique, monochromie, émergence du mythe urbain, création d’un milieu), et la manière dont nous avons tenté de nous en emparer pour fabriquer ce projet.
Peut-on faire des projets d’architecture qui ne soient pas architecturaux ?
1/3 : Objets spécifiques
2/3 : Scénarisation d’un milieu